« Si vous avez un problème et que vous comptez sur la classe politique pour le résoudre, alors vous avez deux problèmes. »
Cette phrase attribuée à Albert Einstein pourrait sembler cynique. Mais elle résume parfaitement la dynamique perverse qui s’installe lorsque l’on attend tout de l’État. Le problème initial persiste, tandis qu’un nouveau surgit : l’intervention étatique devient un obstacle supplémentaire, souvent pire que le mal qu’elle prétend combattre.
Depuis des siècles, l’État justifie ses expansions successives en se présentant comme le protecteur ultime des droits individuels. Pourtant, chaque nouvelle réglementation, chaque nouvelle taxe ou intervention semble éloigner un peu plus les citoyens de cette promesse initiale de sécurité et de liberté. À force de vouloir tout gérer, l’État devient le plus grand prédateur des libertés individuelles.
Face à cette dérive interventionniste, les penseurs libéraux — de Frédéric Bastiat à Murray Rothbard — proposent une alternative radicale : un État minimal, limité à ses fonctions essentielles, chargé uniquement de protéger les droits fondamentaux que sont la vie, la liberté et la propriété. Mais comment garantir cette protection sans tomber dans les excès étatiques ?
Cet article analysera d’abord les dangers de l’expansion de l’État, avant d’explorer les fonctions légitimes d’un État minimal. Car si l’État doit exister, c’est pour protéger les individus, et non pas pour diriger leurs vies.
I. Les dangers de l’expansion de l’État au-delà de ses fonctions minimales
Lorsque l’État dépasse ses fonctions fondamentales de protection des droits individuels — la vie, la liberté et la propriété — il devient rapidement un danger pour ceux qu’il prétend protéger. Chaque intervention publique, si elle semble anodine ou nécessaire à première vue, ouvre la porte à une série d’interventions supplémentaires. Ce processus, décrit par Murray Rothbard comme un effet boule de neige, transforme l’État en un monstre bureaucratique qui restreint toujours davantage les libertés individuelles tout en augmentant son propre pouvoir.
1. L’effet boule de neige des interventions étatiques
L’État possède une dynamique intrinsèque d’expansion. Chaque nouvelle loi, chaque programme social, chaque subvention ou régulation crée des effets secondaires imprévus, nécessitant de nouvelles interventions pour corriger les problèmes engendrés. Cette spirale est sans fin. Rothbard souligne que chaque intervention étatique entraîne des coûts supplémentaires et de nouvelles contraintes, créant ainsi des déséquilibres que seule une autre intervention pourrait prétendre résoudre. Mais, loin de corriger les défaillances qu’il prétend gérer, l’État crée davantage de problèmes qu’il n’en règle.
Prenons un exemple simple : le contrôle des loyers. L’État fixe un plafond de loyer pour protéger les locataires contre des hausses jugées abusives. Mais cette mesure réduit l’incitation des propriétaires à entretenir leurs biens ou à investir dans l’immobilier. Le marché de la location se détériore, et pour y remédier, l’État intervient encore davantage, par exemple en imposant des subventions ou des programmes de logements sociaux. Ce cycle d’interventions génère des coûts économiques et des distorsions croissantes, tout en créant une dépendance des citoyens à l’État.
Cette tendance à l’expansion n’est pas une dérive accidentelle. Elle est inhérente à la logique même du pouvoir étatique, qui se nourrit de ses propres interventions pour justifier sa raison d’être.
2. L’érosion des libertés individuelles
L’expansion de l’État ne se limite pas à la sphère économique. Elle s’accompagne inévitablement d’une érosion progressive des libertés individuelles. Plus l’État prétend protéger les citoyens contre tous les risques — économiques, sociaux ou sanitaires — plus il leur impose des restrictions, les privant de leur autonomie et de leur responsabilité.
L’histoire regorge d’exemples de cette dérive coercitive. La montée des États-providence au XXe siècle, notamment en Europe, illustre parfaitement ce phénomène. À mesure que les gouvernements ont pris en charge la santé, les retraites ou l’éducation, ils ont imposé des réglementations toujours plus intrusives, collecté des impôts de plus en plus lourds et surveillé les comportements individuels au nom du bien collectif.
Aujourd’hui, la surveillance numérique renforce ce contrôle étatique. Sous prétexte de lutte contre le terrorisme ou la désinformation, les gouvernements épient les communications, restreignent la liberté d’expression et centralisent les données personnelles. Cette évolution illustre la transformation de l’État en gardien omniprésent, qui surveille chaque aspect de la vie de ses citoyens, sapant les fondements mêmes de la liberté.
Cette érosion des libertés s’opère souvent sous couvert de bonnes intentions. Les citoyens acceptent les restrictions parce qu’on leur promet sécurité et stabilité. Mais, comme le disait Benjamin Franklin, « ceux qui sont prêts à sacrifier une liberté essentielle pour acheter un peu de sécurité temporaire ne méritent ni liberté ni sécurité ».
3. La critique de l’État moderne par les libertariens
Face à cette dérive étatique, les penseurs libertariens, en particulier Murray Rothbard, ont développé une critique radicale de l’État moderne. Rothbard considère que l’État n’est pas un protecteur, mais un prédateur, un « monopole de la violence légitimée » qui s’impose par la coercition et la force.
Contrairement aux entreprises privées, qui prospèrent en répondant aux besoins de leurs clients, l’État ne crée pas de richesse. Il la confisque par l’impôt et la redistribue selon ses intérêts. Selon Rothbard, cette dynamique fait de l’État un parasite économique qui vit aux dépens de la société productive.
Cette critique va plus loin : l’État, même démocratique, n’a pas de légitimité morale à utiliser la coercition pour atteindre ses objectifs. Le simple fait de disposer du monopole de la violence le rend fondamentalement incompatible avec la liberté individuelle. Pour Rothbard, tout service que l’État prétend offrir, sécurité, justice ou protection sociale, peut être fourni de manière plus efficace et plus respectueuse des libertés par des acteurs privés.
L’État ne peut pas être réformé ou limité durablement. Sa nature même le pousse à étendre son pouvoir au détriment des droits individuels. Dès lors, la seule solution véritable est de réduire l’État à ses fonctions les plus essentielles et de laisser la société s’organiser de manière volontaire et décentralisée.
Les droits fondamentaux à protéger par l’état : vie, liberté, propriété
Dans une société libre, les droits fondamentaux que l’État doit protéger se résument à trois concepts simples mais essentiels : la vie, la liberté et la propriété. Ces droits, considérés comme inaliénables par les penseurs libéraux, forment la base de toute civilisation prospère et pacifique. Toute société qui ne respecte pas ces droits glisse inévitablement vers la coercition, l’arbitraire et la tyrannie. Selon les théories libertariennes, la seule fonction légitime de l’État est de garantir ces droits, sans quoi il devient lui-même la plus grande menace à leur encontre.
1. Le droit à la vie
Le droit à la vie est le plus fondamental des droits. Il implique que chaque individu possède la responsabilité de sa propre existence et a le droit de défendre sa vie contre toute agression. Ce principe repose sur la reconnaissance de la légitime défense comme un droit naturel. Si un individu est attaqué, il a le droit de se protéger, et cette protection ne peut être confiée exclusivement à l’État. La sécurité personnelle est une responsabilité individuelle avant tout.
Cependant, les États modernes ont tendance à limiter ce droit à la légitime défense en imposant des réglementations coercitives sur les moyens de se défendre, comme le port d’armes. Cette intrusion dans la sphère privée réduit l’autonomie des citoyens et les rend dépendants des forces publiques pour leur propre sécurité. Pour les libertariens, cette limitation est une violation directe du droit à la vie. L’État ne devrait pas empêcher un individu de se défendre par lui-même, car cela revient à nier sa souveraineté sur son propre corps et sa propre existence.
De plus, le droit à la vie implique que l’État n’a pas le droit d’attenter à la vie de ses citoyens, que ce soit par des politiques autoritaires, des guerres injustifiées ou des violences policières. Toute législation ou action gouvernementale qui met en péril la vie des individus doit être fermement rejetée. La vie humaine est sacrée et ne peut être sacrifiée sur l’autel de la raison d’État.
2. La liberté individuelle
La liberté est indissociable du droit à la vie. Comme le rappelle Frédéric Bastiat, « La liberté est un droit naturel qui ne peut être aliéné ». Pour les libertariens, la liberté signifie l’absence de coercition. Chaque individu doit être libre de faire ses propres choix tant qu’il ne porte pas atteinte aux droits d’autrui. La liberté n’est pas un privilège octroyé par l’État, mais un droit inhérent à la nature humaine.
Pourtant, les États modernes ont multiplié les lois et les réglementations qui restreignent les choix individuels au nom du bien commun ou de la sécurité publique. Les taxes, les licences obligatoires, les interdictions arbitraires ou les politiques paternalistes sont autant de mesures qui limitent la liberté individuelle et placent les citoyens sous la tutelle de l’État.
Les libertariens rejettent cette vision paternaliste du rôle de l’État. Ils considèrent que les individus sont les mieux placés pour décider ce qui est bon pour eux, et non les bureaucrates ou les politiciens. La liberté implique le droit de prendre des risques, d’échouer, de réussir, de vivre selon ses propres valeurs. Lorsque l’État empiète sur cette liberté en imposant des normes et des règles uniformes, il transforme les citoyens en sujets dociles, incapables d’assumer leurs responsabilités.
La liberté individuelle est aussi un rempart contre les abus de pouvoir. Lorsque les individus sont libres, ils peuvent résister aux tentatives de l’État de contrôler leur vie. En revanche, dans une société où la liberté est réduite, les citoyens deviennent des pions que l’État manipule à sa guise.
3. La propriété privée comme pilier de la civilisation
Le troisième droit fondamental, la propriété privée, est intimement lié à la vie et à la liberté. Pour Frédéric Bastiat, la propriété est le prolongement naturel du droit de chacun à disposer de son propre corps et des fruits de son travail. C’est grâce à la propriété que les individus peuvent transformer le monde autour d’eux, créer de la richesse et améliorer leur condition de vie.
La prospérité économique repose sur la reconnaissance et la protection de la propriété privée. Sans ce droit, les individus n’auraient aucune incitation à travailler, à épargner ou à investir, car ils seraient constamment menacés de se voir expropriés par l’État ou par d’autres individus. La propriété est donc le socle sur lequel repose toute économie de marché, car elle garantit à chacun le fruit de ses efforts.
Cependant, les États modernes ont largement érodé le droit de propriété par le biais de la fiscalité, de la réglementation foncière et des politiques de redistribution. Chaque impôt prélevé, chaque terrain exproprié, chaque restriction imposée à l’usage de la propriété est une violation de ce droit fondamental. Pour les libertariens, l’État ne doit pas s’arroger le droit de disposer des biens d’autrui, car cela revient à voler sous couvert de légitimité légale.
La propriété privée joue aussi un rôle crucial en tant que rempart contre la tyrannie étatique. Lorsque les citoyens sont propriétaires de leurs terres, de leurs maisons, de leurs entreprises, ils sont plus autonomes et moins dépendants de l’État. À l’inverse, lorsque l’État contrôle les moyens de production ou les biens personnels, il peut facilement soumettre les individus à sa volonté.
Bastiat résume parfaitement cette idée en écrivant que la propriété, la liberté et la vie sont interdépendantes. Porter atteinte à l’un de ces droits revient à affaiblir les deux autres. Un individu privé de sa propriété devient vulnérable aux abus de pouvoir. Un individu privé de sa liberté ne peut exercer pleinement son droit de propriété. Et un individu privé de son droit à la vie ne peut jouir d’aucun des deux autres droits.
La légitimité de l’État minimal selon les théories libertariennes
Pour les libertariens, la légitimité d’un État réside exclusivement dans sa capacité à garantir les droits naturels des individus — la vie, la liberté et la propriété — sans jamais empiéter sur ces mêmes droits. Au-delà de ces fonctions, l’État devient une entité coercitive, un prédateur plutôt qu’un protecteur, qui s’arroge des pouvoirs qu’aucun individu ou groupe d’individus ne pourrait légitimement exercer. Cette critique radicale du rôle de l’État est au cœur de la pensée de Murray Rothbard, pour qui le marché libre est le véritable garant des libertés individuelles, tandis que l’État, par nature, repose sur la coercition légitimée.
1. La nature coercitive de l’État selon Murray Rothbard
Pour Rothbard, l’État est une organisation qui détient le monopole de la violence légitimée sur un territoire donné. Contrairement aux entreprises privées, qui prospèrent en servant les besoins des consommateurs de manière volontaire, l’État finance ses activités par la coercition, notamment via l’impôt, qui est perçu comme une forme de vol institutionnalisé. Cette distinction fondamentale entre l’État et le marché est au cœur de la critique libertarienne : tandis que le marché repose sur des échanges volontaires et mutuellement bénéfiques, l’État impose ses décisions par la force.
Rothbard rejette l’idée selon laquelle l’État serait un mal nécessaire. Il considère au contraire que les services que l’État prétend offrir — la sécurité, la justice, les infrastructures — pourraient être fournis de manière plus efficace et plus respectueuse des libertés individuelles par des acteurs privés. Selon lui, la coercition étatique n’est jamais légitime, même lorsqu’elle est exercée au nom du bien commun ou de l’intérêt général.
L’une des critiques majeures de Rothbard porte sur le fait que l’État s’arroge des droits que les individus ne possèdent pas eux-mêmes. Par exemple, un individu n’a pas le droit de voler ou de contraindre ses voisins. Comment, alors, un groupe d’individus réunis en gouvernement pourrait-il acquérir ce droit ? Pour Rothbard, la réponse est simple : l’État ne peut légitimement exercer un pouvoir que les individus eux-mêmes n’ont pas. Ainsi, tout pouvoir coercitif exercé par l’État en dehors de la protection des droits naturels est illégitime.
2. Repenser le contrat social
Les libertariens rejettent également le mythe du contrat social, cette idée selon laquelle les citoyens auraient consenti implicitement à se soumettre à l’autorité de l’État en échange de protection. Pour eux, le contrat social est une fiction historique destinée à justifier la coercition étatique. En réalité, aucun individu n’a jamais signé un tel contrat, et l’État impose ses lois de manière unilatérale, sans véritable consentement.
Frédéric Bastiat résume bien cette critique lorsqu’il écrit que le consentement ne peut être présumé : il doit être volontaire et explicite. Pour les libertariens, les institutions légitimes doivent reposer sur le consentement individuel, et non sur une prétendue volonté collective imposée par une majorité. Chaque individu doit pouvoir choisir librement les services de sécurité, de justice ou d’arbitrage qu’il souhaite utiliser, sans être contraint de dépendre d’un monopole étatique.
Dans un cadre libertarien, les institutions naissent de contrats volontaires entre individus libres. Par exemple, une communauté peut décider de créer une police privée ou un tribunal d’arbitrage, mais les individus doivent être libres de choisir d’y adhérer ou de s’en retirer. Ce modèle repose sur le principe que la légitimité découle du consentement, et non de la force.
Cette approche remet également en question la notion de souveraineté de l’État. Pour les libertariens, la souveraineté appartient aux individus, et non à une entité abstraite comme la nation ou l’État. Chaque individu est souverain sur sa propre vie, ses choix et ses biens. Toute tentative de restreindre cette souveraineté individuelle constitue une violation des droits naturels.
3. L’État comme gardien, pas comme maître
Dans une société libertarienne, l’État ne doit pas être un maître qui dirige la vie des citoyens, mais un gardien chargé de protéger leurs droits naturels. Sa seule fonction légitime est de prévenir et de sanctionner les atteintes aux droits fondamentaux, tels que les agressions, les vols ou les fraudes. Il doit se limiter à un rôle de protection, sans intervenir dans les choix économiques, sociaux ou culturels des individus.
Cette vision implique une séparation stricte entre le pouvoir coercitif de l’État et la sphère économique. L’État ne doit en aucun cas réguler les échanges commerciaux, fixer les prix, redistribuer les richesses ou intervenir dans les affaires privées des individus. La liberté économique est indissociable de la liberté individuelle, et toute ingérence de l’État dans les marchés constitue une violation des droits fondamentaux.
Les libertariens insistent également sur le fait que l’État minimal ne doit pas être exempt de contrôle. Même dans ses fonctions limitées, l’État doit être soumis à des mécanismes de transparence et de responsabilité. Par exemple, les forces de police et les tribunaux doivent être rétribués par des contrats volontaires, et non par des impôts obligatoires. Les citoyens doivent avoir la possibilité de choisir leurs prestataires de services de sécurité et de justice, tout comme ils choisissent leurs fournisseurs d’énergie ou de télécommunications.
En limitant les pouvoirs de l’État à ses fonctions essentielles, on évite les dérives autoritaires et les abus de pouvoir. L’État doit rester au service des citoyens, et non l’inverse. Il ne doit pas imposer sa vision du bien commun, mais garantir que chaque individu puisse vivre librement selon ses propres choix et valeurs, sans crainte d’ingérence ou de coercition.
Les fonctions légitimes d’un État minimal
Pour les penseurs libéraux et libertariens, l’État ne devrait avoir qu’un rôle restreint, limité à la protection des droits fondamentaux que sont la vie, la liberté et la propriété. Toute autre mission dépasse les compétences légitimes d’une entité coercitive et ouvre la voie à des dérives autoritaires. Dans une vision minarchiste, l’État se concentre uniquement sur trois fonctions essentielles : la sécurité intérieure, la défense nationale et la résolution des litiges. Ces fonctions ne justifient pas une bureaucratie tentaculaire, mais un cadre minimal garantissant la protection contre les agressions et les violations de droits.
1. La sécurité intérieure et la justice
L’une des fonctions les plus élémentaires de l’État minimal est de garantir la sécurité intérieure en protégeant les individus contre les agressions, les vols, les fraudes et les atteintes à leur propriété. Cependant, le rôle de la police doit être strictement limité à ces missions de protection. Toute extension des pouvoirs policiers, par exemple en matière de contrôle des comportements ou de surveillance des citoyens, constitue une dérive dangereuse vers un État policier.
Dans une société véritablement libre, la justice ne doit pas être monopolistique. Le système judiciaire étatique, souvent lent, coûteux et inefficace, n’est pas le seul modèle envisageable. Les libertariens proposent des alternatives basées sur l’arbitrage privé, où des parties en conflit choisissent volontairement un arbitre impartial pour régler leurs différends. Ce type de justice contractuelle, déjà utilisé dans de nombreux secteurs comme le commerce international ou les assurances, est plus rapide, plus flexible et moins politisé que le système judiciaire classique.
Murray Rothbard défend cette approche en soulignant que la résolution des litiges peut être assurée par des institutions privées. Ces services concurrents permettraient d’instaurer un marché de la justice, où les citoyens choisiraient librement les prestataires qui garantissent la meilleure protection de leurs droits. Contrairement à la justice étatique, imposée de manière coercitive, l’arbitrage privé repose sur le consentement mutuel.
2. La défense nationale
La défense du territoire contre les agressions extérieures est l’autre fonction centrale d’un État minimal. Cependant, la vision libertarienne de la défense diffère radicalement des modèles militaires étatiques traditionnels. Plutôt que de maintenir une armée permanente coûteuse et susceptible d’être utilisée pour des objectifs impérialistes, les libertariens prônent une défense assurée par les citoyens eux-mêmes, sous forme de milices volontaires.
Cette approche repose sur le principe de la décentralisation de la force militaire. Plutôt que de confier le monopole de la défense à un État centralisé, les citoyens doivent pouvoir s’armer pour assurer leur propre sécurité et celle de leur communauté. Cette vision s’inspire du modèle suisse ou des premières milices américaines, où chaque citoyen est responsable de la défense de sa région. Une population armée et entraînée constitue un rempart efficace contre les invasions extérieures tout en limitant les risques d’abus de pouvoir militaire par l’État.
Les libertariens critiquent le complexe militaro-industriel, qui pousse les États modernes à justifier des guerres coûteuses et inutiles au nom de la sécurité nationale. Ce mécanisme sert avant tout à enrichir les industries de l’armement et à accroître le pouvoir des bureaucrates militaires. L’impérialisme étatique n’a rien à voir avec la défense légitime, mais tout à voir avec l’expansion du pouvoir coercitif. Rothbard et d’autres pensent que la meilleure défense est une politique de non-intervention et le refus des guerres d’agression menées au nom d’intérêts étatiques.
3. Résoudre les litiges par des systèmes volontaires
Dans une société libre, les conflits doivent être résolus de manière volontaire et contractuelle, sans passer par des tribunaux étatiques. L’arbitrage privé est une solution éprouvée, déjà largement utilisée dans des secteurs où les systèmes judiciaires publics sont inefficaces. Les parties en conflit choisissent un arbitre indépendant qui, contre rémunération, propose une solution équitable respectant les termes du contrat initial.
Les assurances contractuelles constituent une autre alternative au monopole étatique de la justice. Plutôt que de dépendre d’un État pour garantir la protection de leurs biens ou pour faire respecter leurs contrats, les individus peuvent souscrire à des assurances privées qui couvrent les risques liés aux litiges. Ces assurances incluent souvent des clauses d’arbitrage, où les assureurs prennent en charge les coûts d’une médiation ou d’un arbitrage en cas de conflit.
Dans un système basé sur le volontariat, la concurrence entre les prestataires de services juridiques garantirait une meilleure qualité de service. Les arbitres et les compagnies d’assurance seraient incités à offrir des solutions justes et efficaces, sous peine de perdre leurs clients. Cette dynamique de marché serait bien plus efficace que le système judiciaire étatique, où les citoyens sont forcés d’accepter les décisions de juges nommés par l’État, souvent influencés par des considérations politiques.